Cour de cassation : quels inédits retenir cette semaine ?

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25/09/2020
Social - Contrat de travail et relations individuelles, Paye et épargne salariale, IRP et relations collectives, Santé, sécurité et temps de travail, Formation, emploi et restructurations, Contrôle et contentieux

Les arrêts de la Chambre sociale de la Cour de cassation à retenir parmi les non publiés du fonds de concours de la semaine du 21 septembre 2020.
Le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l’employeur dans la lettre de licenciement
Il résulte de l’article L. 1232-6 du Code du travail que la lettre de licenciement fixant les limites du litige, le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l’employeur dans cette lettre.
Pour dire que le licenciement repose sur une faute grave et débouter le salarié de l’intégralité de ses demandes, l’arrêt retient que la faute grave commise par le salarié pendant la période du préavis justifie que soit requalifié en licenciement pour faute grave son licenciement pour cause réelle et sérieuse. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-10.583 F-D

Réorganisation de l'entreprise comme motif de licenciement : l’existence d’une menace pesant sur la compétitivité doit être caractérisée
Il résulte de l’article L. 1233-3 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, qu'une réorganisation de l'entreprise ne constitue un motif de licenciement que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi.
Pour juger le licenciement de la salariée fondé sur un motif économique réel et sérieux, l’arrêt retient que le fait de regrouper le poste unique d’infographie basé à Metz au sein du département existant depuis 2008 de conseil ingénierie et développement au Luxembourg constitue une optimisation des moyens existants au sein de l'entreprise, ce qui devrait permettre, à terme, une meilleure rentabilité et participer à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.
En se déterminant ainsi, sans caractériser l’existence d’une menace pesant sur la compétitivité de l’association ou du secteur d’activité du groupe dont elle relève, la cour d’appel a violé le texte susvisé. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-11.514 F-D

Préjudice moral : il faut un comportement fautif de l’employeur ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant de la perte de l'emploi
Pour condamner l’employeur à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, l’arrêt d’appel retient que le licenciement injustifié du salarié congédié pour faute grave, lui a causé un préjudice moral, distinct de celui résultant de la perte d’emploi et qui s’est traduit par un profond sentiment d’injustice, déstabilisant et, finalement, handicapant.
En se déterminant ainsi, sans caractériser un comportement fautif de l’employeur, ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant du licenciement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-14.878 F-D

Principe de la recevabilité en appel des demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail : pour quelles instances ?
Il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l'article R. 1452-7 du Code du travail, aux termes desquelles les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel, demeurent applicables aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes antérieurement au 1er août 2016. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 18-24.523 F-D

Prime annuelle d’objectifs : elle doit être versée au salarié dont le départ est antérieur à la date contractuelle de versement de la prime
Pour débouter la salariée de sa demande en paiement de rappel de salaire au titre de la prime d’objectifs, l’arrêt constate d’abord que l’article 7 du contrat de travail prévoit au titre de la rémunération de la salariée une prime d’objectifs qui, à objectifs atteints, sera égale à un mois de salaire, laquelle pourra être portée jusqu’à deux mois de salaire en cas de dépassement de ces mêmes objectifs, définis chaque année avec le responsable hiérarchique, que le versement de cette prime est subordonné à la présence de la salariée aux effectifs de la société au 31 décembre de l'année civile et qu’en cas de rupture du contrat de travail pour quelque motif que ce soit, il n'y aura donc pas lieu pour la société de verser la prime d’objectifs pour l'année considérée. L’arrêt retient ensuite que la salariée démontre qu’elle a systématiquement perçu cette prime d’objectifs versée annuellement au mois de mars de l’année qui suit. Il ajoute que la prime litigieuse, liée aux objectifs fixés à la salariée, était annuelle et son paiement contractuellement conditionné à la présence de la salariée dans l'entreprise en fin de période.
En  statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la prime d'objectifs prévue par le contrat de travail constituait la partie variable de la rémunération versée à la salariée en contrepartie de son activité de sorte qu'elle s'acquérait au fur et à mesure, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-13.471 F-D

Priorité de réembauche : la charge de la preuve pèse sur l’employeur
Selon l'article L. 1233-45 du Code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2014-699 du 26 juin 2014, il incombe à l'employeur d'informer le salarié licencié pour motif économique qui a manifesté le désir d'user de la priorité de réembauche de tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification. Il en résulte qu'en cas de litige, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation soit en établissant qu'il a proposé les postes disponibles, soit en justifiant de l'absence de tels postes. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-14.078 F-D

Négociation du protocole électoral des élections des membres du CSE et documents permettant de contrôler la réalité de l'effectif de l'entreprise
Ayant relevé que, dans le cadre de la négociation du protocole préélectoral, l'employeur avait remis au syndicat le registre unique du personnel, la liste des contrats à durée déterminée autres que de remplacement, la liste des intérimaires, la liste des prestataires, la liste des salariés à temps partiel ainsi qu'un tableau des effectifs et que le syndicat n'établissait pas la nécessité de pièces complémentaires pour permettre le calcul des effectifs de l'entreprise, le tribunal a, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, pu retenir que l'employeur avait satisfait à son obligation d'information. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-60.185 F-D

Paiement des heures de délégation : elles doivent être payées à l'échéance normale même si l’employeur les conteste
Il résulte de l'article L. 2142-1-3 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 que les heures de délégation considérées de plein droit comme temps de travail, qu'elles soient prises pendant ou hors les heures habituelles de travail, doivent être payées à l'échéance normale, et que l'employeur ne peut saisir la juridiction prud'homale pour contester l'usage fait du temps alloué aux représentants du personnel pour l'exercice de leur mandat qu'après l'avoir payé.
Pour rejeter les demandes du salarié en paiement des heures de délégation afférentes à son mandat de représentant de section syndicale pour la période de novembre 2011 à avril 2013, outre les congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour le non-paiement des heures de délégation, l'arrêt retient que le salarié, qui n'allègue pas avoir effectivement utilisé les heures de délégation prévues par les dispositions de l'article L. 2142-1-3 du Code du travail, doit être débouté de ses demandes en paiement de ces heures et de dommages-intérêts à ce titre.
En statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 18-23.805 F-D

Les changements d’horaires peuvent justifier une prise d’acte
Le changement d’un horaire de nuit à un horaire de jour, dont l’existence n’était pas contestée par l’employeur, opéré malgré l’opposition des salariés, est en l’espèce suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 18-18.040 F-D


 
 
 
Source : Actualités du droit